II La Hermetic Brotherhood of Luxor
René Guénon a t’il été membre de la H.B. of L. ?
René Guénon a cité plusieurs fois la H.B. of L. dans son oeuvre. Nous allons publier ses passages par ordre chronologique. Dans cette première partie nous indiquerons les publications de René Guénon après la première guerre mondiale et avant la mort de F. Ch. Barlet. Il faut rappeler que René Guénon fait référence à la H. B. of L. dans des articles publiés sous pseudonyme avant la première guerre mondiale. Nous reviendrons sur ces derniers. Enfin dans certaines lettres écrites par René Guénon on peut trouver quelques mentions de cette organisation. Il s’agit de lettres publiées dans certains livres. Nous rappelerons qu’il s’agit d’une correspondance privée qui ne devait pas être éditée. De ce fait, nous nous en tiendrons à la seule oeuvre rendue publique (nous avons d’ailleurs eu l’occasion de lire ce passage sur un site (un des liens que nous proposons sur notre blog) : http://www.rene-guenon.org/crrspd.html).
I 1921: La H. B. of L. dans « Le Théosophisme, histoire d’une pseudo-religion ».
- « Le Théosophisme, histoire d’une pseudo religion » (voir bibliographie) : Nous rappelerons que ce livre a été édité en 1921. Les extraits que nous publions ont été édités dès cette date (sauf les notes additionnelles qui n’apparaissent que lors de la deuxième édition) :
Édition 1986 – p. 14, n. 2 « Si nous nous en rapportons à certains renseignements qui nous ont été communiqués, mais qu’il ne nous a pas été possible de vérifier directement, ce Metamon serait le père d’un autre personnage qui fut quelque temps à la tête du « cercle extérieur » de la H.B. of L. (société secrète dont nous parlerons plus loin), et qui, depuis lors, a fondé une nouvelle organisation d’un caractère assez différent ».
Idem – pp. 23: « … ce Felt, qui se disait professeur de mathématiques et égyptologue (1), était membre d’une société secrète désignée habituellement par les initiales « H. B. of L. » (Hermetic Brotherhood of Luxor) (2). Or cette société, bien qu’ayant joué un rôle important dans la production des premiers phénomènes du « spiritualisme » en Amérique, est formellement opposée aux théories spirites, car elle enseigne que ces phénomènes sont dus, non pas aux esprits des morts, mais à certaines forces dirigées par des hommes vivants » … »
Idem p. 23, n. 2: « Cette société ne doit pas être confondue avec une autre qui porte le nom similaire de Hermetic Brotherhood of Light, et qui ne fut fondée qu’en 1895. Il y a même une troisième Hermetic brotherhood, sans autre désignation, qui fut organisée à Chicago vers 1885. »
Idem p. 24: « C’est que Felt venait de la faire affilier, ainsi qu’Olcott, à la H. B. of L. : « J’appartiens à une Société mystique », … »
Idem pp. 25-26: « Nous devons dire maintenant, pour n’avoir pas à y revenir, que Mme Blavatsky et Olcott ne restèrent pas bien longtemps attachés à la H. B. of L. , et qu’ils furent expulsés de cette organisation quelques temps avant leur départ d’Amérique (1). Cette remarque est importante, car les faits précédents ont parfois donné lieu à de singulières méprises ; c’est ainsi que le Dr J. Ferrand, dans une étude publiée il y a quelques années (2), a écrit ceci, à propos de la hiérarchie qui existe parmi les membres de la Société Théosophique : « Au-dessus des dirigeants qui constituent l’Ecole théosophique orientale (autre dénomination de la « section ésotérique »), il y a encore une société secrète, recrutée dans ces dirigeants, dont les membres sont inconnus, mais signent leurs manifestes des initiales H. B. of L. » Connaissant fort bien tout ce qui se rapporte à la H. B. of L. (dont les membres, d’ailleurs, ne signent point leurs écrits de ces initiales mais seulement d’un « swastika »), nous pouvons affirmer que, depuis ce que nous venons de rapporter, elle n’a jamais eu aucune relation officielle ou officieuse avec la Société Théosophique ; bien plus, elle s’est constamment trouvée en opposition avec celle-ci, aussi bien qu’avec les sociétés rosicruciennes anglaises dont il sera question un peu plus loin, quoique certaines individualités aient pu faire partie simultanément de ces différentes organisations, ce qui peut sembler bizarre dans de pareilles conditions, mais n’est pourtant pas un fait exceptionnel dans l’histoire des sociétés secrètes (3). Nous possédons d’ailleurs des documents qui fournissent la preuve absolue de ce que nous avançons, notamment une lettre d’un des dignitaires de la H. B. of L. , datée de juillet 1887, dans laquelle le « Bouddhisme ésotérique », c’est-à-dire la doctrine théosophiste, est qualifié de « tentative faite pour pervertir l’esprit occidental », et où il est dit encore, entre autres choses, que « les véritables et réels Adeptes n’enseignent pas ces doctrines de « karma » et de « réincarnantion » mises en avant par les auteurs du Bouddhisme Esotérique et autres ouvrages théosophiques », et que, « ni dans les susdits ouvrages ni dans les pages du Theosophist, on ne trouve une vue juste et de sens ésotérique sur ces importantes questions ». Peut-être la division de la H. B. of L. en « cercle extérieur » et « cercle intérieur » a-t-elle suggéré à Mme Blavatsky l’idée de constituer dans sa Société une « section exotérique » et une « section ésotérique » ; mais les enseignements des deux organisations sont en contradiction sur bien des points essentiels ; en particulier, la doctrine de la H. B. of L. est nettement « antiréincarnationniste », et nous aurons à y revenir à propos d’un passage d’Isis Dévoilée quio semble bien en être inspiré, cet ouvrage ayant été écrit par Mme Blavatsky pendant la période dont nous nous occupons actuellement ».
(1) Un ouvrage intitulé « The Transcendantal World », par C. G. Harrison, qui parut en Angleterre en 1894, semble contenir des allusions à ce fait et à l’antagonisme qui exista depuis lors entre la H. B. of L. et la Société Théosophique ; mais les informations qu’il contient relativement aux origines occultes de cette dernière ont un caractère trop fantastique et sont trop dépourvues de preuves pour qu’il nous soit possible d’en faire état.
(2) « La doctrine de la Théosophie, son passé, son présent, son avenir : Revue de Philosophie », août 1913, pp. 14-52. – Le passage que nous citons ici se trouve à la page 28.
(3) Le plus extraordinaire est peut-être que le Theosophist publia, en 1885, une annonce de l’Occult Magazine, de Glasgow, dans laquelle il était fait appel aux personnes qui désireraient « être admises comme membres d’une Fraternité Occulte, qui ne se vante pas de son savoir, mais qui instruit librement et sans réserve tous ceux qu’elle trouve dignes de recevoir ses enseignements ». Cette Fraternité, qui n’était pas nommée, n’était autre que la H. B. of L., et les termes employés étaient une allusion indirecte, mais fort claire, aux procédés tout contraire dont usait la Société Théosophique, et qui furent précisément critiqués à plusieurs reprises dans l’Occult Magazine (juillet et août 1885, janvier 1886).
Idem p. 31: » Cette affirmation est d’ailleurs parfaitement exacte, et nous croyons sans peine qu’aucune alliance de ce genre n’eut été possible sans l’attitude antispirite que Mme Blavatsky affichait depuis quelques temps, plus précisément depuis son affiliation à la H. B. of L. ; … ».
Idem p 36: » La lettre du comte Mac-Gregor porte les devises suivantes : « Sapiens dominabitur astris. – Deo duce, comite ferro. – Non omnis moriar. – Vincit omnia veritas », dont la dernière chose curieuse, est également la devise de la H. B. of L., adversaire déclarée de la Société Théosophique et de la Société Rosicruciana (1) ».
Idem, p. 36, n. 1 : « La H. B. of L. avait une interprétation particulière du Rosicrucianisme, dérivée principalement des théorie de P. B. Randolph et de la « Fraternité d’Eulis ». – Il parut à Philadelphie, en 1882, un ouvrage intitulé The Temple of the Rosy-Cross, dont l’auteur, F. B. Dowd, était un membre de la H. B. of L. »
Idem, pp. 38-39: « Pourtant quand il était sous l’influence de la H. B. of L., Olcott n’avait que du mépris pour les Rosicruciens modernes : « La Fraternité (des Rose-Croix), écrivait-il à Staiton Moses en 1875, en tant que branche active de l’Ordre véritable, est morte avec Cagliostro, comme la Franc-Maçonnerie (opérative) est morte avec Wren ; ce qui en reste n’est que l’écorce. » Ici, les mots « branche active de l’Ordre véritable » font allusion à un passage des enseignements de la H. B. of L. dans lequel il est dit que le terme de Rose-Croix ne désigne par l’Ordre tout entier, mais seulement ceux qui ont reçu les premiers enseignements dans son prodigieux système ; ce n’est qu’un nom de passe par lequel les Frères amusent et, en même temps, mystifient le monde ». »
Idem, p. 95: René Guénon fait référence à Mme Emma Hardinge-Briiten présentée comme ancien membre de la Société Théosophique et membre de la H. B. of L.
Idem, p. 95, n. 1: » Certains la regardent comme l’auteur des ouvrages anonymes intitulés « Art Magic » et « Gosthland », qui se rattachent aux théories de cette école. »
Idem, p. 99: « Il est facile de reconnaitre dans ce passage l’influence de la H. B. of L.; en effet, l’enseignement de celle-ci, bien qu’absolument « anti-réincartionniste » en thèse générale, admet pourtant, bien à tort, quelques cas d’exception, trois exactement: celui des enfants mort-nés ou mort en bas âge, celui des idiots de naissance, et enfin les incarnations « messianiques » volontaires, qui se produiraient tous les six cent ans environ (à la fin de chacun des cycles appelés Naros par les Chaldéens), mais sans que le même esprit s’incarne jamais ainsi plus d’une fois, et sans qu’il y ait consécutivement deux semblables incarnations dans une même race; … ».
Idem, p. 118 : « Du reste, il y a encore beaucoup mieux à dire que cela contre la réincarnation, car, en se plaçant au point de vue de la métaphysique pure, on peut en démontrer l’impossibilité absolue, et cela sans aucune exception du genre de celle qu’admettait la H. B. of L.; … »
Idem, p. 120.
Idem, p. 136: « Il est curieux de voir Mme Besant reprendre ici (à cela près qu’elle y fait intervenir les « âmes des morts ») la thèse de la H. B. of L. sur l’origine du spiritisme, et plus curieux encore qu’elle ait pensé la faire accepter par des spirites ; … ».
Idem, p. 207, n. 1: « La H. B. of L. ne fixait son origine qu’à « 4320 ans avant l’année 1881 de l’ère actuelle »; c’était relativement modeste, et encore faut-il dire que ces dates se référaient au symbolisme des « nombres cycliques ».
Idem, p. 299, n. 2: « Rappelons également à ce propos que l’année 1882, celle même où parut la Voie Parfaite, devait, d’après la duchesse de Pomar, être le commencement d’une ère nouvelle ; et, coïncidence singulière, on trouve une affirmation identique dans les enseignements de la H. B. of L. ».
Idem, pp. 299-300, n. 2 et n. 3.
À partir de la 2e édition, le livre est accompagné de notes additionnelles.
Idem, notes additionnelles, p. 313-315 : « Page 23. – Certains théosophistes ont affirmé, avec une insistance qui prouve que la chose a quelque importance pour eux, que la H. B. of L. avait été une « imitation » ou même une « contrefaçon » de la Société Théosophique, ce qui implique qu’elle n’aurait été fondée que postérieurement à celle-ci. Nous devons donc préciser que la H. B. of L. avait été « réorganisée extérieurement » dès 1870, c’est-à-dire qu’en cette année avait été fondé le « cercle extérieur » dont la direction fut, en 1873 (et non en 1884 comme il a été dit dans le Theosophist), confié à Max Théon ; celui-ci, qui devait plus tard se faire le propagateur de la doctrine désignée sous le nom de « tradition cosmique », et dont nous avons appris la mort tout récemment, était, paraît-il, le fils de Paulos Metamon (voir p. 12, note 2). Quant aux formes antérieures de la H. B. of L., il faut les chercher sans doute dans des organisations qui ont été connues sous divers autres noms, notamment dans la « Fraternité d’Eulis » de P. B. Randolph (voir p. 34, note 1 ; Eulis est une altération voulue d’Eleusis), et même dans le mystérieux « Ordre d’Ansaireh » auquel celui-ci était rattaché ; sur ce point, nous renverons aussi à ce que nous avons dit d’autre part dans « L’Erreur spirite » (pp. 20-21 et 27). De plus, nous pouvons dire maintenant que les douments inédits concernant la H. B. of L. nous ont été communiqués par F.-Ch. Barlet, qui en avait été le représentant officiel pour la France, après avoir été un des fondateurs de la première branche française de la Société Théosophique, dont il se sépara d’ailleurs en 1888 à la suite de dissensions dont on peut retrouver les échos dans la revue Le Lotus. – L’hostilité de la Société Théosophique à l’égard de la H. B. of L. se manifesta particulièrement, en 1886, à propos d’un projet de fondation d’une sorte de colonie agricole en Amérique par des membres de cette dernière organisation. Mme Blavatsky trouva là une occasion favorable pour se venger de l’exclusion dont elle avait été l’objet en 1878, et elle manoeuvra de telle sorte qu’elle arriva à faire interdire au secrétaire général de l’Ordre, T. H. Burgoyne, l’accès du territoire des Etats-Unis, en faisant parvenir aux autorités américaines des documents établissant qu’il avait subi autrefois une condamnation pour escroquerie. Seul, Peter Davidson, qui portait le titre de « Grand-Maître provincial du Nord », alla s’établir avec sa famille à Loudsville, en Géorgie, où il est mort il y a quelques années, après avoir fondé, alors que la H. B. of L. était déjà « rentrée en sommeil », une nouvelle organisation appelée « Ordre de la Croix et du Serpent » (allusion au symbole biblique du « serpent d’airain ») et ayant pour organe une revue intitulée The Morning Star. C’est Peter Davidson qui écrivit à F.-Ch. Barlet, en juillet 1887, la lettre dont nous avons cité quelques phrases (p. 24); voici un autre extrait de cette même lettre: « il faut aussi observer que la Société Théosophique n’est pas et n’a jamais été, depuis que Mme Blavatsky et le colonel Olcott sont arrivés dans l’Inde, sous la direction ou l’inspiration de la Fraternité authentique et réelle de l’Himâlaya, mais sous celle d’un Ordre très inférieur appartenant au culte bouddhique. je vous parle là d’une chose que je sais et que je tiens d’une autorité indiscutable ; mais, si vous avez quelque doute sur mes assertions, M. Alexander de Corfou a plusieurs lettres de Mme Blavatsky dans quelques-unes desquelles elle confesse clairement ce que je vous dis. » L’ordre bouddhique dont il s’agit ici n’est autre, vraisemblablement, que le Mahâ-Bodhi Samâj, c’est-à-dire l’organisation qui avait pour chef le Rév. H. Sumangala, principal du Vidyodaya Parivena de Colombo (voir pp. 104-105 et 169-170). Un an plus tard, Peter Davidson écrivait, dans une autre lettre, cette phrase quelque peu énigmatique: « Les vrais Adeptes et les Mahâtmas véritables sont comme les deux pôles d’un aimant, bien que plusieurs Mahâtmâs soient assurément membre de notre Ordre ; mais ils n’apparaissent pas comme Mahâtmâs que pour des motifs trés importants. »
Idem, p. 315: « Page 27 – La similitude partielle des noms de Chintamon et de Metamon paraît avoir donné lieu à quelques confusions; nous ne voyons pas d’autre explication possible à l’assertion bizarre contenue dans un article, d’ailleurs plein d’informations erronées et tendancieuses, paru dans l’Occult Review de Londres en mai 1925, et où ce Chintamon (dont le nom a été déformé en Christaman, qui n’a rien d’hindou) est présenté comme ayant été le chef plus ou moins caché de la H. B. of L.
Idem, p. 319: « Page 63 – M. Alfred Alexander, qui publia la correspondance de Mme Blavatsky et des Coulomb, est le même que M. Alexander de Corfou, dont il est question dans la lettre adressée par Peter Davidson à F.-Ch. Barlet en 1887 et que nous avons citée plus haut (notes additionnelles de la p. 23).